Définition
La monnaie est l'ensemble des actifs que les individus utilisent régulièrement pour acheter des biens et services à d'autres individus.
La monnaie a trois fonctions dans une économie :
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Un moyen d'échange
Il s'agit d'éviter la “double coïncidence of wants” inhérente au troc dont parlait Stanley Jevons ; n'importe quel bien peut constituer un moyen d'échange pour autant qu'il soit accepté comme moyen de paiement. Le degré de liquidité d'un actif est le degré de facilité avec laquelle un actif peut être transformé en monnaie.
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Une unité comptable
C'est la mesure que les individus utilisent pour établir les prix des biens, les comparer et comptabiliser les dettes.
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Une réserve de valeur
C'est le moyen que les individus peuvent utiliser pour transférer du pouvoir d'achat entre le présent et le futur. Comme l'inflation entraîne une perte de pouvoir d'achat de la monnaie, la fonction de réserve de valeur n'est véritablement remplie que si les prix sont globalement stables.
Analyse
La monnaie a une double étymologie et on peut dire en exagérant un peu que notre vision de la monnaie alterne sans cesse entre ces deux origines :
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Latine : moneo qui signifie avertir ou prévenir ; la moneta était en effet un objet déposé dans le temple de la déesse de la connaissance et de la prédiction (Junon). La monnaie est ici liée au sacré, en particulier à Dyonysos (association de la monnaie et du délire) et à Pluton (la monnaie fait naître le secret et la fourberie). Irrationnelle et obscure, la monnaie est liée aux passions fortes des hommes ; c'est pourquoi les utopistes (Thomas More…) déclinent des sociétés sans monnaies. C'était Keynes qui affirmait en 1919 dans ses Conséquences économiques de la paix : "Il n'y a pas de moyen plus certain de subvertir la base existante de la société que de débaucher la monnaie. Le processus engage toutes les forces occultes de la loi économique dans le sens de la destruction, et le fait d'une manière que pas un homme sur un million n'est capable de diagnostiquer".
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Grecque : nomisma renvoie à nomos, la loi positive, la convention, l'objet inventé par les hommes ; la monnaie est ici une institution créée par la loi et au service de la vie sociale, un objet sans mystère. Signe que les hommes se font dans les échanges, la monnaie est liée ici a la confiance. De nombreux économistes ont une vision grecque : par exemple, dans l'équilibre général à la Arrow-Debreu, la monnaie est si peu nécessaire qu'une chambre de compensation placée sous l'autorité du commissaire-priseur peut permettre la circulation des marchandises ; plus généralement, la plupart des auteurs néo-classiques ont pris soin de distinguer un bloc réel et un bloc monétaire, sachant que le second est déterminé par le premier ; la monnaie est neutre, c'est à dire que l'accroissement des quantités de monnaie agit sur le niveau des prix, pas sur les prix relatifs.
Divers types de monnaie
L'évolution des formes de la monnaie matérielle s'explique par sa vocation de facilitation des échanges. Les économies primitives ont été marquées par l'apparition de monnaies marchandises. Les monnaies métalliques ont progressivement pris le pas sur les monnaies marchandises.
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La monnaie marchandise prend la forme d'un bien ayant une valeur intrinsèque. L'or et l'argent sont, évidemment, les références les plus significatives. Historiquement, ils ont constitué la monnaie divisionnaire (pièces). Aujourd'hui, sauf exception liée à leur coût de fabrication, la valeur faciale des pièces dépasse souvent la valeur réelle du métal qui les composent.
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La monnaie fiduciaire ou billets de banque n'a pas (ou peu) de valeur intrinsèque. Si, au départ, chaque banque pouvait émettre ses propres billets, la législation en a progressivement accordé le monopole à une banque privée. En France, la Banque de France n'accède à ce monopole qu'en 1848. Aujourd'hui, les banques d'émission ont un statut public.
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La monnaie scripturale est créée par les institutions bancaires ex nihilo. Lorsqu'une banque effectue un prêt à court terme à l'un de ses clients, elle ne dispose pas nécessairement de la monnaie nécessaire à l'opération. Celle-ci est néanmoins sans risque aussi longtemps que l'emprunteur ne demande pas de billets ou n'effectue pas un virement bancaire au bénéfice d'une autre banque. La monnaie scripturale est réellement une monnaie privée dont l'émission est contrôlée ex post par les autorités monétaires.
Il est à noter que les chèques, les cartes de crédit… ne sont pas de la monnaie, mais des instruments de circulation monétaire.
La grande question posée par la monnaie est d'assurer que son volume croisse avec le volume des affaires de façon à éviter la déflation. Le passage de la monnaie marchandise aux monnaies fiduciaire et scripturale à joué ce rôle. Cela a contribué à améliorer parallèlement la commodité et la sécurité des transactions : il est plus sûr de se déplacer avec une carte bleue qu'avec une forte somme en monnaie fiduciaire !
La création monétaire
Consubstantielle au passage des économies au capitalisme, l'apparition des banques a autorisé le développement du crédit et, à travers lui, la généralisation de la création monétaire.
Un dépôt de monnaie fiduciaire dans une banque est enregistré au crédit, comme un actif – la banque détient effectivement une créance sur la Banque de France – et au passif – la banque a effectivement une dette vis-à-vis du déposant. Si la banque pense que ce dépôt en monnaie fiduciaire ne fera pas l'objet d'une demande en restitution dans un délai donné, elle peut effectuer un prêt sur cette base. Ce prêt prendra la forme d'une inscription en compte courant (monnaie scripturale). Si le bénéficiaire du prêt utilise cette somme sous forme de virement bancaire au bénéfice d'un client de la même banque, la monnaie émise circule sans aucun limitation. Ainsi, lorsqu'une banque effectue un prêt sans qu'elle ne dispose de réserves en or (hier), en billets (aujourd'hui), l'offre de monnaie s'accroît. Le multiplicateur de crédit est le montant total de monnaie que le système monétaire génère à partir d'un euro prêté.
La banque centrale et l'offre de monnaie
La banque centrale est la banque des banques. Lorsqu'une banque de second rang est soumise à des retraits de monnaie fiduciaire supérieurs à ses avoirs, elle se tourne vers la banque centrale qui lui prête de l'argent en contrepartie d'actifs non monétaires (créances sur l'Etat par exemple).
Les autres fonctions de la Banque centrale relèvent de la régulation générale du système monétaire. Elle est globalement caution du bon fonctionnement du système bancaire, ce qui lui donne un droit de supervision et de régulation sur le fonctionnement des banques de second rang. Elle assure la liquidité du système et conduit la politique monétaire, c'est-à-dire ajuste la quantité de monnaie aux besoins de l'économie en évitant à la fois l'inflation et la déflation. En cas de crise, elle assure la fonction de prêteur en dernier ressort.
Les banques centrales sont, aujourd'hui, des institutions publiques. Cela n'a pas toujours été le cas. Privées, les banques centrales sont susceptibles d'utiliser leur pouvoir contre l'Etat ; publiques, elles sont sous l'autorité des hommes politiques qui peuvent abuser du crédit dans des buts électoraux. La formule actuelle d'une indépendance « dans l'Etat » a globalement fait ses preuves, même si elle est toujours discutée.
Conclusion
- Par son émergence et par l'évolution de ses formes, la monnaie a permis d'améliorer le fonctionnement des marchés. En palliant les insuffisances des systèmes de troc, la monnaie permet de faciliter les échanges.
- Le lent mouvement de l'histoire converge vers la dématérialisation de la monnaie. Ce qui, historiquement, a freiné le mouvement, c'est le rôle central de la confiance. L'or est une valeur refuge dont le pouvoir d'achat à long terme est étonnamment stable… On ne peut en dire autant des billets. Pourtant, la thésaurisation n'a pas complètement disparu…
Le futur de la monnaie : quelques pistes
Source : OCDE (2001).
Note de lecture : en ordonnée, la hiérarchie monétaire de la forme la plus étatique à la forme privée ; en abscisse, de la monnaie physique et territorialisée à la monnaie abstraite, virtuelle. C'est une façon de représenter simplement l'évolution de la monnaie vers des formes nouvelles, privées et électroniques.
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L'histoire témoigne aussi du fait que l'Etat cherche toujours à contrôler l'offre de monnaie. Il le fait tantôt pour lutter contre toutes les formes de fraude (qu'on songe à la pureté plus ou moins grande du métal précieux), tantôt pour détourner à son profit la création monétaire (qu'on songe au financement monétaire des déficits publics). Endetté, l'Etat est aussi l'un des premier bénéficiaires de l'inflation. C'est pourquoi, le contrôle de l'offre de monnaie lui a été progressivement retiré dans la plupart des pays industrialisés.
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En écho à Keynes, cité plus haut, Lénine concluait que "le meilleur moyen de détruire le système capitaliste était de débaucher la monnaie". L'histoire l'a abondamment montré, que ce soit avec les assignats de la Révolution française, l'hyperinflation allemande (1923) ou les déboires monétaires récurrents de l'Argentine… A chaque fois, une crise sociale a accompagné la crise monétaire.