Notion

Volatilité du marché des actions

Définition

Le marché des actions connaît des fluctuations beaucoup plus importantes que l'activité réelle. Or, la volatilité du prix des actifs est coûteuse en bien-être : une division par deux de la volatilité du marché US des actions signifierait pour les ménages américains un gain en bien-être, via la réduction de l'incertitude, de près de 200 milliards de dollars par an selon les estimations du rapport Davanne (1998).

Analyse

Les pics de volatilité enregistrés au cours des années récentes n'apparaissent pas atypiques par rapport aux autres grands chocs historiques, et ont même été inférieurs en ampleur à ceux enregistrés dans les années 1930 ou en 1987. C'est encore plus manifeste si l'on s'intéresse à la volatilité de moyenne fréquence (variations mensuelles ou trimestrielles) plutôt qu'à celle de très haute fréquence (variations journalières). Il n'y a pas de tendance claire à l'augmentation structurelle de la volatilité sur les marchés d'actions, mais en revanche une situation particulière entre 2000 et 2003 avec l'apparition de troubles importants.

Variations sur trois mois du SP 500

Source : Exane

Lecture : On n'observe pas de tendance nette à la hausse de la volatilité sur trois et les pics ne sont pas plus marqués qu'autrefois

Les explications de la dernière période de volatilité

  1. Les chocs de l'économie réelle

Parmi les facteurs conjoncturels susceptibles d'expliquer la volatilité des marchés financiers à la fin du XX° siècle, on note une accumulation tout à fait exceptionnelle de chocs économiques et géopolitiques. La bulle de la "nouvelle économie" est bien connue, avec une phase de sur-endettement dans des secteurs comme les télécoms. Par ailleurs, les attentats du 11 septembre et la guerre en Irak ont augmenté l'incertitude et accru les tensions internationales. Notons enfin la crise de confiance induite par les affaires Enron, Ahold ou Parmalat. Dans un tel contexte, c'est davantage l'absence de volatilité plutôt que l'inverse qui devrait être une surprise !

  1. Les innovations financières

Les facteurs structurels ayant trait aux différents types d'innovations financières, qu'il s'agisse de produits ou de pratiques de marché (gestion alternative et ventes à découvert, développement des dérivés de crédit, croissance du marché des obligations convertibles et des fonds à capital garantis…), les économistes sont presque unanimes : les techniques et les produits ne peuvent être par eux-mêmes facteurs de déséquilibre. Au contraire, certaines innovations correspondent à un développement des arbitrages entre marchés et accroissent la liquidité globale des marchés financiers, ce qui tend plutôt à en réduire la volatilité. L'argument d'une hausse de volatilité due aux innovations financières ne semble pas reposer sur une base empirique réellement solide, et la base théorique est nulle.

  1. Le comportement des investisseurs institutionnels

Certaines analyses insistent aussi sur le comportement des investisseurs institutionnels (tels les sociétés d'assurance-vie, les fonds de pension…), qui par le jeu des contraintes comptables et réglementaires se trouvent confrontés à la liquidation prématurée d'une partie de leurs actifs (à engagements inchangés). Dans le contexte d'une baisse d'ampleur exceptionnelle des marchés d'actions, cela a pour résultat de priver ces marchés des principaux pourvoyeurs de liquidité structurels à long terme.

Il y a sur les marchés deux types d'investisseurs : les "court-termistes" (traders, hedge funds) et les "long-termistes" (banques, assurances, fonds de pension). Les court-termistes fournissent la liquidité à court terme et sont des opportunistes qui arbitrent les mouvements de très court terme des marchés. A l'opposé, les investisseurs institutionnels ont, du fait de la nature de leurs engagements, des horizons d'investissement longs, même très longs (plusieurs dizaines d'années parfois) et par conséquent jouent un rôle de stabilisateurs sur les marchés. Ainsi, si le marché baisse beaucoup et constitue des niveaux d'achat pour le long terme, les investisseurs institutionnels (les long-termistes) achèteront quand les "court-termistes" vendront. De cette observation il découle une conséquence très importante : plus le marché sera dominé par les "court-termistes", qui jouent un rôle essentiel en tant que fournisseurs actifs de liquidités permettant de corriger les imperfections de marché sur le court terme, plus il sera volatil. D'où l'importance de créer les conditions nécessaires sur les marchés pour que les investisseurs institutionnels puissent jouer pleinement leur rôle.

Le rôle de la volatilité des marchés

  1. La volatilité est un indicateur de tensions économiques

La volatilité est la "matière première" d'une bonne partie des activités de marché. Elle assure une fonction de contrepartie pour couvrir les risques de l'économie réelle. La diminuer ne doit constituer en aucune façon un objectif exclusif, ni même prioritaire, pour le régulateur. La volatilité est un révélateur d'autres problèmes ; elle est la conséquence plus que la cause de l'instabilité.

  1. Une amélioration des instruments financiers peut diminuer la volatilité des marchés

C'est la volatilité résiduelle qu'il faudrait réduire, celle que les agents ne peuvent pas compenser notamment du fait de marchés trop incomplets. Si les innovations financières mettent à la disposition des agents un outil supplémentaire de couverture du risque, permettant ainsi un fonctionnement plus efficace de l'économie, alors leur présence est très probablement bénéfique. En d'autres termes, l'arbre ne doit pas cacher la forêt, et les considérations techniques sur les effets de volatilité occulter l'essentiel, à savoir la capacité des marchés à répondre de façon aussi efficace que possible aux besoins de l'économie.

  1. Les politiques économiques peuvent accroître la volatilité

La reconnaissance du rôle et de l'impact de la politique monétaire, et de la politique tout court, sur l'évolution des marchés (actions, obligations, taux de change…) et de l'économie, devrait relativiser les procès d'intention dont souffrent aujourd'hui les innovations financières souvent montrées du doigt avec facilité comme étant les responsables de la déstabilisation.

Prime de risque actions dans le monde

Evolution d'un indice boursier élargi et de la consommation des ménages américains

Source : Exane (2002)

Lecture : le Wilshire 5000 (échelle de gauche) regroupe les 5000 premières capitalisations de la bourse américaine, c'est un indicateur plus large que le Dow Jones (30 premières valeurs industrielles), le Nasdaq (valeurs high tech) ou le S&P 500 ; son évolution est presque parfaitement congruente avec celle de la consommation des ménages américains (échelle de droite), au moins sur la période considérée. Ce qui signifie soit que les cours de bourse influent sur la consommation (l'effet richesse) soit l'inverse. Dans tous les cas, la différence entre les deux échelles montre bien que la volatilité boursière est plus forte que les variations de l'activité.

Conclusion

Le renforcement structurel des investisseurs institutionnels, par nature des"agents longs", apparaît (du moins en Europe continentale) comme une nécessité pour qui veut réduire la volatilité. Cela passe forcément par la création de véhicules à horizon de placement long : émergence de fonds de pensions, renforcement de l'épargne salariale. N'oublions pas que le marché français, à ce jour handicapé dans ce domaine, a connu une volatilité supérieure à celle des Etats-Unis.

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